Anticiper une crise grave lorsqu’on porte des lunettes est un sujet qui me tient à cœur car je suis atteint d’une myopie relativement sévère. La vue est probablement le sens le plus important pour assurer sa survie puisqu’elle permet entre autres la détection du danger. Situation de survie ou pas la vue est la vue… les visages de nos proches, les paysages, le jour qui se lève et la nuit qui tombe. Tellement précieuse.

Conduire, s’orienter, apercevoir un danger au loin, identifier ses proches, tirer avec précision et en étant sûr de sa cible, tout cela est impossible lorsqu’on est atteint d’une déficience visuelle qu’on ne peut pas ou plus corriger. Si être privé de ses lunettes ou lentilles de contact quelques heures est désagréable, cela peut représenter une condamnation à mort dans des situations où la normalité laisse place à une coulée de boue, à un panache de fumée toxique ou dans toute autre situation où une réaction rapide et avisée est nécessaire pour survivre.

Je vous livre ici ma réflexion sur le sujet au travers de mon expérience personnelle.

Les lentilles de contact : une vue parfaite, des conséquences potentiellement désastreuses à long terme

J’ai commencé à porter des lentilles à l’adolescence. La fin des lunettes a sonné pour moi comme une révolution en termes de confort et une nouvelle ère de liberté : fini la gêne et l’encombrement des lunettes, plus d’angles morts, plus de problèmes pour enfiler un casque ou un masque, plus besoin de trimbaler une paire de solaires adaptée à ma vue en été, bref le pied…

J’ai porté des lentilles journalières pendant 15 ans sans rencontrer le moindre problème en dehors d’avoir les yeux rouges le soir.

survivre quand on porte des lentilles de contact

Les lentilles assèchent les yeux et provoquent l’éclatement des vaisseaux sanguins.

Il y a 4 ans, je me suis réveillé avec une forte douleur à l’œil droit. Les urgences du CHNO des 15/20 m’ont appris que je faisais un abcès de cornée lié à l’utilisation de mes lentilles de contact. L’action mécanique de les mettre/enlever chaque jour pendant 15 ans avait fini par creuser une minuscule cavité dans laquelle une bactérie s’est logée. Tout cela en dépit du soin  avec lequel j’ai toujours manipulé mes lentilles. Situé 1 millimètre plus haut, l’abcès m’aurait rendu aveugle. En bref, j’ai failli perdre la vue sur l’œil droit, mon œil directeur, et j’ai passé 2 semaines dans le noir total avant de constater une amélioration.

Fini les lentilles, interdiction à vie. Retour aux lunettes.

L’intervention de chirurgie réfractive au  laser LASIK, PKR, SMILE… vous reprendrez bien un peu de risque ?

C’est à ce moment que j’ai été pris en charge et suivi par le professeur L., chef du service du centre de la cornée aux 15/20, qui a donc guéri mon œil au bout de 8 mois de traitement à raison de 3 gouttes 6 fois par jour, un calvaire quotidien.  Ce cher professeur (au sens propre) m’a alors informé que je serais plus tranquille si je me débarrassais de ma myopie grâce à une intervention chirurgicale au laser. On s’est donné rendez-vous un an plus tard pour laisser le temps à mon œil de se remettre complètement. Ou presque, car depuis l’abcès mes yeux sont restés un peu rouges, irrités.

Le moment venu, le professeur L. m’examine et me dit que mes problèmes sont réglés, que je suis le candidat idéal pour le laser, me vante en long en large et en travers les vertus du Lasik et sort son agenda avec un air autoritaire pour fixer la date de l’opération au mois prochain. Sans me parler des risques éventuels liés à l’opération. Sans me laisser le temps de dire quoi que ce soit. Sans me laisser poser de questions. Je ne lui en ai posé qu’une seule :

– Pourquoi portez-vous des lunettes, si l’opération est si bénigne et efficace que vous le dites ?

– Je préfère porter des lunettes.

Fais ce que je dis et pas ce que fais. J’ai eu un mauvais pressentiment, je lui ai demandé de la documentation et je suis parti en me délestant d’un chèque à trois chiffres.

Quand je vois ça, je préfère moi aussi porter des lunettes.

Deux jours plus tard, je me réveille, j’ai mal à l’œil droit (heureux hasard) et mon œil gauche est irrité aussi. Je fonce aux urgences des 15/20 et l’urgentiste qui m’avait déjà pris en charge la fois précédente me dit que j’ai une conjonctivite allergique aiguë.

Je lui explique que j’ai vu le professeur L. deux jours plus tôt (j’avais déjà les yeux rouges rappelez-vous), qu’il veut m’opérer au laser dans 1 mois et je vois à l’expression sur son visage que quelque chose cloche. Il m’a expliqué que mes yeux étaient irrités en permanence pour diverses raisons (pollution, tabac, allergie bénigne à quelque chose dans mon environnement, etc.) et que cela allait inévitablement provoquer de gros problèmes post-opératoires si je passais au laser, quelle que soit la technique utilisée (Lasik, PKR ou Smile). Il s’est étonné que le professeur L. n’aie pas détecté cela (façon détournée de me dire qu’il l’a forcément vu mais ne m’a rien dit), m’a prescrit de quoi soigner mes yeux et je suis parti.

J’ai pris contact avec un groupe de victimes de la chirurgie au laser (Affectés Lasik sur Facebook et je vous invite également à consulter la page http://lesdangersdulasik.com/) pour me renseigner sur les séquelles possibles suite à une chirurgie de ce type. J’ai pu discuter avec des personnes qui avaient perdu la vue sur un œil, les deux, ou qui souffrent de distorsions visuelles sévères qui les handicapent lourdement au quotidien. Certaines d’entre elles se sont suicidées, ne supportant plus les douleurs incsoutenables qu’elles subissaient sans que la médecine ne leur apporte de solution ni de reconnaissance pathologique. Certaines avaient été opérées par le professeur L.

Médecin, boucher à ses heures comme tant d’autres sur ce segment.

« Ne vous inquiétez pas, j’en ai soigné d’autres ! »

J’ai fait le choix de porter des lunettes. Une contrainte vaut mieux qu’une complainte.

Je sais qu’il y a des dizaines d’exemples de chirurgies laser réussies autour de vous, c’est le cas aussi autour de moi. Le problème, c’est que cette chirurgie est destructive et ne peut pas convenir à tout le monde. Les séquelles post-opératoires peuvent se déclarer plusieurs dizaines d’années après l’opération. Cela peut être un franc succès pour certains et tant mieux.

Mais avez-vous envie de prendre le risque de perdre la vue ou de souffrir de douleurs et d’aberrations visuelles handicapantes juste pour vous débarrasser de vos lunettes ou de vos lentilles ?

troubles de la vision après lasik

Difficile de conduire et de vivre au quotidien avec ce genre d’aberrations visuelles liées au LASIK, PKR ou SMILE.

Nous sommes dans une logique de survie. Cela implique de ne pas prendre le risque de transformer une situation supportable en un calvaire pour une question de confort.

Les lunettes de vue : une fiabilité nécessaire pour tout survivaliste

Le port de lunettes est contraignant à bien des égards : elles sont fragiles, encombrantes pour qui doit porter un casque ou un masque respiratoire, il faut une paire de solaires à sa vue pour les jours ensoleillés… mais en dehors de cela, elles représentent le moyen de correction visuel le plus neutre pour votre santé.

Dans des conditions impliquant une hygiène dégradée ou des facteurs irritants (fumées, gaz, etc.) le port des lentilles de contact devient dangereux ou impossible. En cas de rupture de la normalité, la dernière chose dont vous aurez besoin est d’espérer trouver une boite de lentilles à votre correction ou d’aller pointer aux urgences ophtalmiques (si elles fonctionnent) car vos yeux sont irrités ou car vos lentilles sont collées à vos cornées.

Depuis que j’ai pris la décision de m’en tenir aux lunettes, j’ai rassemblé toutes les paires que j’avais conservé afin d’avoir du rechange en cas de besoin. Je dispose d’une petite dizaine de montures aux corrections plus ou moins fortes qui pourraient me rendre service si je ne pouvais plus me rendre chez l’opticien. Tout cela en plus de la traditionnelle seconde paire gratuite à ma vue actuelle. Je me suis équipé d’un petit set de réparation contenant vis et plaquettes de nez en tous genres en cas de besoin.

Pour ceux qui veulent anticiper une situation dégradée au point où il n’y aurait plus ni ophtalmos ni opticiens, ou tout simplement une situation où ils n’auraient pas la capacité de s’y rendre, conserver les vieilles paires de lunettes est une bonne solution. Il est également possible d’anticiper des futurs troubles visuels mineurs en s’équipant d’avance de lunettes basiques à correction fixe  ou de lunettes de lectures pour la presbytie.

Légendat