Cet article va être un peu différent des autres. Pas de matériel ou de techniques de survie cette fois. Tuer en légitime défense pour un civil est un sujet dont je veux discuter avec vous parce qu’il est souvent évoqué, mais ses conséquences beaucoup moins. Cela fait un moment que je réfléchis à ça et chaque fait divers de légitime défense me ramène à mes réflexions sur les conséquences psychologiques d’un tel acte pour une personne non aguerrie combat.
La violence. C’est un mot qui abreuve notre société et qui fascine notre espèce. Nous adulons sa puissance et l’élevons à quelque chose de presque artistique : littérature, cinéma, dessins animés, séries télévisées, informations, musique…la violence est partout. Comme l’argent et le sexe. Les 3 piliers de notre société sont bien inquiétants.
Il y a quelque temps, je suis tombé sur un article détaillant les 5 principales façons de tuer un cambrioleur armé. Ce genre billets de blogs détaché est devenu la pierre philosophale de certains sites survivalistes qui incitent à s’armer lourdement et à ouvrir le feu à la première opportunité. Je vais être clair, tuer en légitime défense ne me choque pas et ne me pose aucun problème éthique. Le problème que je vois dans la plupart de ces articles, c’est qu’on laisse un éléphant dans la pièce en faisant mine de ne rien voir. Cet éléphant qui est souvent complètement ignoré, ce sont les conséquences psychologiques d’un meurtre. Légitime défense ou pas, c’est un très, très gros éléphant.
On peut se fantasmer en justicier flamboyant mais la conséquence froide de l’utilisation d’une arme létale sur un individu, c’est un cadavre sur le sol. Et avant d’en arriver à cette vision désolée, il faut avoir le cran d’attenter à la vie de cette personne. Facile, direz-vous ?
En tant qu’espèce, nous parlons de vie, de survie et de mort chaque jour. Des notions qui s’entremêlent, finalement. Un jour, nous devrons peut-être tuer pour survivre et protéger la vie de nos familles –et nous le ferons– mais la réalité objective est que le meurtre est la conclusion brutale d’un acte violent dont peu de personnes sont capables de se remettre.
Vous êtes peut-être assis à la maison en pensant que si vous deviez protéger votre famille vous tueriez sans hésiter et je vous rejoindrais à 100% en ce qui concerne cette évaluation. En tant que protecteur, je n’ai aucune réserve à propos de la défense de mes proches, ni aucune hésitation. Cela étant dit, tuer en légitime défense est très différent du mythe héroïque qu’Hollywood nous enfonce dans la gorge à longueur de temps.
J’ai récemment lu un excellent livre sur le sujet, disponible uniquement en anglais mais qui se lit très bien. On Killing: The Psychological Cost of Learning to Kill in War and Society de Dave Grossman explique comment la société civile et l’armée poussent les hommes à outrepasser leur aversion naturelle pour le meurtre et les conséquences que cela engendre. C’est un ouvrage unique en son genre qui mérite d’être lu, je vous le recommande.
Dans notre préparation survivaliste, nous tentons chaque jour de prévoir des événements qui bouleverseraient nos vies. Pour la plupart, ce sont des troubles ponctuels. Tuer un homme ou plusieurs, en légitime défense ou pas, a des conséquences irréversibles et perpétuelles.
J’aimerais entendre vos pensées sur le sujet. Où êtes-vous de cette réflexion ? Avez-vous, vous ou vous proches, vécu des situations de légitime défense et quelles en ont été les conséquences ?
Légendat
Bonsoir la Légende,
Article pertinent et point de vue que je rejoins en grande partie :
Comme toi, je tuerai sans sourciller pour protéger un proche. En théorie en tout cas, car je n’ai fort heureusement jamais eu besoin de le faire.
Comme toi, cela ne me pose aucun problème éthique lorsque je lis qu’un voyou a été abattu lors d’un braquage ou autre forfaiture du même acabit.
Comme toi, je plains la matraque qui a visité les entrailles sombres du célèbre Théodore Luhaka, communément appelé « Théo » dans les médias. Je m’égare.. 😀
Ma réflexion diffère de la tienne sur les conséquences principales d’un meurtre : les conséquences juridiques. Autrement dit, le risque d’emprisonnement, avec son lot de joyeusetés qu’il apporte : privation de liberté, vivre loin de mes proches et entouré des pires raclures (notamment).
Sans compter que je ne suis ni amateur ni professionnel du taillage de pipes…
Les conséquences psychologiques, je m’en tamponne le coquillard. C’est probablement un choc de tuer. Mais si je suis en légitime défense – au sens éthique du terme, pas forcément juridique – je ne pense pas que je serai perturbé bien longtemps.
j’abonde dans le même sens que vous sur tous les points. Ce qui me tracasse c’est le après juridique… enquête de police , procès et possible accusation criminel. Et la finale possiblement la prison a moins d’être dans un temps de trouble social majeur ou il s’agirais d’un cas de survie.
Pour la perturbation psychologique je pense que je serais en mesure de passer par dessus sans trop de difficulté, dans mon travail j’ai souvent eu a côtoyer la mort et vue des mort violente et je vie très bien avec ce que j’ai vue lors d’accident de la route , suicide etc.
Il y a quelques années une émission avait été dédiée au sujet ( Capital ou Zone interdite je ne sais plus). On y voyait un monsieur assez âgé qui avait tiré au fusil de chasse sur des cambrioleurs armés qui s’étaient introduits dans sa maison, il était ravagé par ce qu’il avait fait. Il racontait comment il avait vu le corps d’un assaillant coupé en 2 par sa chevrotine, comment le type d’était répandu un peu partout dans une gerbe rosée bref c’était gore. Il expliquait qu’il revivait la scène nuit et jour et que ça ne le quittait plus. Je pense qu’au-delà du réflexe de préservation qui est évident (moi aussi, j’ouvrirais le feu pour protéger ma vie et ma famille) il y a une partie de nous qui ne revient pas d’un tel geste (qu’il soit nécessaire ou non).
Salut,
La légitime défense est très complexe et mis à part l’aspect psychologique en cas de tir sur un cambrioleur il faut aussi prendre en compte la réalité de la légitime décence.
En effet si on tire sur un cambrioleur et quand fait il n’était pas armé alors la on est dans la merde au niveau pénal.
Ancien militaire j’ai fait vigipirate à Paris et lors de mes patrouilles avec 2 autres soldat un civil est venu à la confrontation verbale. Calmement je lui ai dit d tracer sa route et j’ai rendu compte dans la minute au force de l’ordre qui était les seuls à pouvoir l’appréhender.
Et oui c’est ça la France mais au moins ça canarde pas de partout.
Faut différencier voir un mort et donner la mort, psychologiquement c’est pas comparable… pour ce qui est du penal, je préfère être en prison que entre 4 planches de sapin…
Beaucoup de personnes sont bercés par les clichés d’Hollywood et croient que donner la mort c’est comme couper un arbre que ça ne représente rien. Et ils se trompes….
Super articles.
Excellent article qui invite à la réflexion mais, pour être tout à fait franc, je ne sais pas quelle sera ma réaction si je devais être confronté à une telle situation.
Un homme qui, quand tout va bien, semble être celui sur qui on peut toujours s’appuyer, un meneur charismatique, peut se retrouver complètement tétanisé face au danger.
A contrario, il est tout à fait possible qu’un autre homme qui, d’ordinaire, passe pour quelqu’un d’insignifiant, voire de trouillard, peut se révéler être un combattant et un meneur face au danger.
Il ne faut pas oublier aussi que chacun d’entre nous a ses propres limites, ce qui fait qu’un soldat aguerri peut craquer en plein champ de bataille parce qu’il aura atteint ses limites.
Après, je pense qu’il y a aussi la situation générale qui doit agir. Tuer quelqu’un en période de « normalité » (situation actuelle) et tuer quelqu’un dans une période hors normalité (effondrement de la société) peut ne pas être ressenti pareillement. Par exemple, je pense qu’en période de normalité j’aurai peut-être moins d’état d’âme envers une personne qui agresse ma famille ou moi-même gratuitement, pour le plaisir parce qu’il lui manque une case, que supprimer un père de famille qui chercherait à voler un peu de nourriture pour nourrir sa famille en période d’effondrement de la société.
Mais comme je le disais au début, difficile à dire ce que je ferai vraiment si une telle situation venait à se produire.
En postulant qu’il n’y a plus d’état de droit, à mon avis il y a l’adrénaline à évacuer (sujet à creuser), il y a aussi des réactions physiologiques (vue du sang, des tripes etc) à gérer, le plan de la psychée aussi et de ses références spirituelles.
La littérature, les films donnent parfois de vrai témoignages pour s’aider.
salutation à vous…
Je suis dans la sécurité nationale et par deux fois j’ai failli user de mon arme…
la première était sur un différend de couple dans un appartement, quand mon collègue devant moi a ouvert la porte car le beau frère nous avait donné les clefs , le mec a déboulé a poils des tatouages japonais de partout sur le corps et un grand katana au manche blanc dans les mains…le mec en chargeant bras tendu s’est arrêté a deux centimètre du ventre de mon collègue , qui tétanisé ne trouvait pas son arme…le mec a alors armé son bras et c’est à ce moment là que j’ai sorti la mienne, j’ai visé pleine tête et je lui ai crié « lâche ton arme » …ce qu’il a fait et on l’a maitrisé…
la deuxième était sur un schizophrène en crise qui s’etait barricadé chez lui en mode mohamed merrah… cet enfoiré avait mis la moitié de son appartement devant sa porte…apres l’avoir enfoncé avec les pompiers nous sommes rentrés et cet enfoiré avait jetté au sol du liquide vaisselle jaune ( c’est le pire de tout, tres efficace pour ralentir qui que ce soit)…il nous attendait planqué derrière un mur avec un fusil harpon et il nous tirait dessus de temps en temps…puis mon arme en main je l’ai visé mais je n’ai pas tiré et lui de ce temps en a profité pour me tirer dessus et m’atteindre à la joue droite …total une molaire cassée, une douleur de folie au niveau de la gencive et un trou dans la joue gauche…on l’a finalement interpellé en vidant une bonbonne de gaz lacrymogene.
tout ça pour dire que lorsque cela se presente : on a un dixieme de seconde pour analyser la situation alors que les tribunaux ils ont quatres ans pour vous juger lorsque vous êtes en préventive….
Je pense que les conséquences psychologiques de tuer quelqu’un, légitime défense ou pas, découlent directement de l’évolution de notre société et de la déresponsabilisation concernant notre sécurité. Peu en arrière, cet acte passait directement dans les pertes et profits, si je puis m’exprimer ainsi, sans état d’âme. Un exemple type, qui n’est pas français mais qui décrit bien le contexte, concerne la pendaison systématique des voleurs de chevaux aux Etats-Unis aux débuts de l’Union. Cela peut paraître barbare et disproportionné de nos jours, mais à l’époque, se faire voler son cheval dans les grands espaces signifiait la mort. La sentence était à la hauteur du préjudice et chacun l’admettait comme telle. De nos jours, dans nos pays « civilisés » on ne trouve même plus approprié de corriger ses enfants. Nous n’avons plus le mental pour faire face à notre propre survie. Pour changer ça, il faut entamer une réflexion préalable et considérer la mort autrement, la nôtre et celles des autres. Retrouver le vrai sens de la vie, considérer que celle-ci a un prix qui dépasse ses fonctions biologiques, et porter haut les valeurs qui ont fondé notre civilisation, quand des hommes, et aussi des femmes, savaient se sacrifier pour défendre leurs idéaux. Nous devons redevenir des chevaliers, des Léonidas et des Boadicée. Alors la mort changera de sens et nous pourrons l’accepter pour nous-même comme pour les autres. C’est un vaste sujet.
Bonjour, merci pour ce billet Légendat, par contre je m’attendais plus à ce que tu parles des conséquences judiciaires, c’est ce qui attends tout le monde, sans distinction, le psychologique est trop hétérogène.
Dans une société encore stable, c’est la pire des suites car soigner ses blessures psychiques au calme, sans pression est dur mais se fait avec le temps. Par contre quand on est dans un imbroglio judiciaire (à tort ou à raison attention), l’accablement de toute part rend ce chemin des plus tortueux …
Il est vrai que la légitime défense est extrêmement complexe et soumise à interprétation, mais de ce que des amis avocats pénalistes m’ont brièvement dit, la base, bien connue de nos Forces, est « l’usage proportionné de la force ».
On ne répond à une aggression physique que par le physique, armée par une arme équivalente en « très gros » sinon ça se retourne contre nous dans tous les cas.
Il serait très formateur qu’une vision impartiale et bien informée de ces suites soit présentée ici pour tous 🙂