La violence est omniprésente et nous avons tous déjà vu une personne se faire attaquer gratuitement dans la rue. Qu’il s’agisse d’un vol à l’arrachée ou d’un cassage de gueule dans les règles, lorsqu’on repense à ces scènes on se rend compte qu’elles auraient pu être évitées.

La violence peut être une expérience traumatisante qui bouleverse une vie. Qu’elle soit physique ou psychologique, elle peut être juste un autre jour au travail sous la pression de collègues toxiques, une autre traversée de hall d’immeuble sous les insultes des « jeunes » qui tiennent les murs ou une altercation violente et insensée avec un inconnu. Les conséquences se résument à la façon dont vous pouvez faire face à la violence, à la fréquence à laquelle vous y êtes exposé et à sa gravité.

Que vous soyez une victime sans défense ou un combattant aguerri, la violence change une personne pour toujours, à un moment où à un autre. C’est un fait établi. La profondeur du changement et sa nature (développement d’une peur ou d’un penchant pour la violence) dépend de la personne et des ressources mentales dont elle dispose.

Le fait que la violence ait un impact si fort sur notre psychisme signifie que nous devons nous arrêter et y réfléchir avant de nous trouver devant le fait accompli. Par exemple, je sais que je suis quelqu’un d’assez patient capable de résister longtemps à des provocations mais qu’une fois que j’ai atteint mon point de non-retour, je deviens hors de contrôle pour les autres et pour moi-même. Sachant que je n’ai plus de limites une fois que j’ai atteint la mienne, j’ajuste mes réactions pour éviter au maximum de me trouver confronté à ce problème.

Savoir sourire à son prochain.

Comme la boîte de Pandore, une fois que la trappe de la violence est ouverte il n’y a aucun moyen d’y remettre la peste des malheurs qu’elle a libérés dans nos vies. Malheureusement, beaucoup de gens ne réalisent pas à quel point ce que nous pensons – et par extension, ce que nous faisons- nous met en danger de violence et combien il est important de la maîtriser et de la fuir.

Mise en danger, perception et réalité

Dans mon article sur la survie au quotidien, j’évoquais un cas très classique d’altercation en milieu urbain : vous marchez avec votre femme dans la rue, et des racailles s’amusent à vous chauffer en disant qu’elle est « bonne » ou l’insultent. Dans ce cas de figure, outre le fait que ces « gentilles-victimes-de-notre-société-coupable-de-tous-les-maux » sont de vrais connards juste bons à servir de paillassons, c’est votre égo qui vous fait monter en pression : vous avez le sentiment que si vous ne réagissez pas, vous perdrez votre statut de mâle dominant aux yeux de votre femme. Cette idée est une pure bêtise qui peut vous coûter cher s’ils sont nombreux, défoncés et/ou décidés à vous casser la gueule. La meilleure réaction dans un cas comme celui-ci est de ne pas leur prêter attention et de les laisser pourrir à leur place, c’est-à-dire avec le reste des excréments qui jonchent les trottoirs de la ville.

Ceux qui tapent et s’acharnent à 20 contre 1, mes préférés.

La règle d’or pour ne pas se retrouver face à la violence, c’est de ne pas se mettre en danger. Très logiquement, si vous ne vous mettez pas dans des situations ou vous pouvez vous faire agresser, vous réduisez drastiquement le risque que cela arrive. Si votre passe-temps favori est d’arpenter les quais de Seine ou les tunnels de la Porte de Clignancourt la nuit, ce qui vous est arrivé ou ce qui va vous arriver est entièrement de votre responsabilité. Le risque est déjà présent dans des lieux « normaux » à des heures « normales », alors n’allez pas chercher les ennuis là où ils se trouvent.

Quand vous devez vous rendre dans un endroit que vous ne connaissez pas en pleine nuit (et pour certains coins, même en plein jour) renseignez-vous au préalable sur la zone. La bible dit que l’ignorance est une bénédiction, mais pas dans les cas où elle vous amène à vous faire poignarder ou violer dans une ruelle à 4h du matin.

Affirmation de soi et agressivité

L’affirmation de soi empêchera une attaque. L’agressivité en provoquera une. Par exemple, lors d’un trajet en RER un large groupe de racailles a commencé à chercher les ennuis avec les passager de ma rame. Lorsqu’ils sont arrivés à mon niveau (j’étais assis côté couloir) l’un d’eux a commencé à se coller à moi pour me tester et provoquer une réaction. Ma casquette l’empêchait de voir mon visage puisqu’il était debout et moi assis. Je me suis contenté de me raidir (sans le pousser) de façon à lui faire sentir le bras qui allait lui arriver dans la face s’il continuait et cela a suffit à lui donner envie d’aller tenter sa chance ailleurs. Sans dire un mot ni croiser son regard, je lui ai affirmé que j’avais le contrôle de mon espace et que j’étais prêt à le défendre s’il le fallait. Si je m’étais levé en lui disant d’aller se faire poutrer par ses potes, la situation aurait dégénéré et à 20 contre 1, j’étais cuit.

Pour illustrer ce propos de façon plus large, s’affirmer c’est faire sortir quelqu’un de votre jardin avant qu’il ne s’introduise dans votre maison. Ce n’est pas seulement le garder hors de chez vous, c’est surtout le faire sortir cordialement mais fermement de votre propriété et le ramener sur la voie publique afin qu’il poursuive sa route et ne se mette pas à poser de problème sérieux.

Être agressif est l’équivalent mental et émotionnel de  chasser manu militari cette personne qui arpente votre jardin. Même si vous pensez que cela est nécessaire pour protéger votre propriété, vous ne vous défendez plus. Vous avez franchi la ligne d’affirmatif à agressif. Le gros problème avec ce genre de comportement, c’est que la personne que vous poursuivez ne va pas forcément courir très loin. On en revient à la perception, mais de son côté cette fois-ci : s’il a le sentiment que vous empiétez sur son bon droit, légitime ou non, il pourrait décider de vous casser la mâchoire voire plus si affinités.

La plupart des gens sont choqués et étonnés quand une situation devient violente. Mais la simple vérité c’est que beaucoup de gens qui pensaient se protéger franchissaient en réalité la ligne séparant l’affirmation de soi de l’agressivité. Ils pensaient montrer à l’autre personne que son comportement les faisaient se sentir agressé, mais ce qu’ils ont réellement fait, c’est provoquer une contre-attaque. Et quand on a en face de soi un déséquilibré, une personne impulsive ou un groupe de sauvages, la situation peut escalader très vite. Petit exemple ici.

Pour vivre vieux, il faut avoir la chance de ne pas croiser la route d’un taré. Nombreux sont ceux qui, comme Arthur Noyer, ne sont plus là pour témoigner de la véracité de cette phrase. Évitez de vous mettre en position de faiblesse et lorsque vous sentez le danger, éloignez-vous en. Personne ne vous décernera de médaille si vous cassez la gueule de votre agresseur et vous n’aurez pas non plus de funérailles de héros si vous finissez sur le carreau.

Réponse au stress et poussées de violence

L’adrénaline n’est pas seulement une drogue, c’est un cocktail de produits chimiques. En termes compréhensibles, lorsque vous êtes sous adrénaline, vous êtes à la fois saoul physiquement, défoncé mentalement et hypertendu nerveusement. De quoi vous attirer un paquet d’emmerdes. L’adrénaline affecte profondément votre processus de pensée en activant des réflexes de survie et de rage que peu savent maitriser et canaliser. La manière dont notre esprit et notre corps fonctionnent sous la réponse du stress surrénalien est un facteur majeur dans le risque de réagir de manière excessive dans une situation de violence.

Quand on se trouve pris dans une situation de violence, on est souvent face à des personnes qui ont passées leurs vies entières dans des contextes violents ou ultra-violents. Ces gens ont des connexions (ou des absences de connexions) mentales qui mènent à une mauvaise prise de décision. Des décisions qui finissent par aggraver les problèmes jusqu’à ce que les choses dégénèrent en crise. Les personnes issues de milieux dysfonctionnels manquent souvent des connexions neurales que les «gens normaux» ont. Ils n’ont jamais eu l’occasion de les développer ou, dans des contextes abusifs, des liens différents ont été établis. Si vous faites monter ces gens en pression, vous aurez autant de chance de les dissuader que si vous vous adressiez à un lampadaire.

Souvent après une altercation ou une bagarre on entend « Je n’étais pas agressif(ve), c’est lui/elle qui l’était ! ». Un vieux dicton dit qu’il faut être deux pour se battre et aussi bête que ça paraisse, c’est vrai. Lorsque vous avez une situation impliquant deux personnes, vous êtes face à une dynamique complexe. Plus précisément ce que vous avez, ce sont les émotions, les sentiments et les perceptions de deux personnes. C’est l’action, l’interaction et la réaction de ces personnes qui peuvent mener à la violence. Et plus ces personnes sont différentes et impulsives, plus le tonnage de la bombe à désamorcer est important.

Émotions et self-control face à la violence

Lorsque vous vous engagez dans un mode émotionnel, même si vous croyez que vous réagissez à ce qui se passe, vous réagissez en fait à ce que vous pensez qu’il est en train de se passer. Et ça, c’est une énorme différence. Il faut apprendre à désactiver le pilote automatique pour repasser en pilotage manuel dans ces situations qui requièrent une finesse d’analyse dont l’adrénaline et la colère vous privent.

Pour cette raison, développer la capacité de s’analyser rapidement en situation de stress/violence est un pas de géant vers la résolution pacifique d’un conflit. Il suffit parfois de reculer d’un pas ou de baisser d’un ton pour faire retomber la pression. Cette capacité à désamorcer un conflit est particulièrement importante lorsqu’on porte une arme de service ou une arme d’auto-défense : ces outils doivent servir en dernier recours pour deux raisons : la première, c’est le respect de la loi et la seconde, c’est que vous ne savez pas ce que la personne en face de vous peut sortir en réponse. Matraque contre couteau, c’est perdu pour vous et pour de bon.

On ne sait jamais ce que l’autre a dans les poches.

En parlant de self-control, si vous êtes porteur d’une arme d’auto-défense rappelez-vous que sa vocation est de vous protéger en cas d’agression physique vous mettant en danger, pas d’impressionner un éventuel agresseur ou de mettre au tapis un abruti qui vous a énervé. Vous êtes un protecteur, ne devenez pas l’agresseur !

Le déminage verbal au quotidien

La clé de tout est la communication. Une communication efficace est un sujet bien au-delà de la portée de ces lignes. Mais c’est un élément essentiel dans la capacité à s’affirmer efficacement sans être agressif.

Je suis sûr que vous avez déjà eu une réaction émotionnelle à ce que quelqu’un a dit ou fait. Quelque chose a été dit ou fait que vous avez pris pour une insulte ou une critique et vous avez réagi à chaud… pour découvrir quelques instants plus tard que vous aviez mal compris ou entendu ce que la personne voulait dire ou faire. Bienvenue dans la différence entre perception et réalité. Ou pour être plus précis, dans votre réalité personnelle, mélange boueux de croyances, d’égo, d’insécurités et de projections comportementales. Ce n’est pas une insulte, juste un fait : c’est le bordel dans votre tête, ne faites pas semblant de ne pas le savoir.

Quand quelque chose que quelqu’un a dit vous fait mal, un collègue ou un ami par exemple, apprenez à demander « Excuse-moi, mais quand tu m’as dit ça, qu’est-ce que tu voulais dire exactement ? » (sans lui coller votre flingue sur la tempe évidemment, sinon c’est de la triche).

J’ai cru mal entendre ce que tu viens de dire, peux-tu répéter s’il-te-plait ?

Au lieu de supposer d’entrée de jeu que la personne a intentionnellement voulu vous infliger une détresse émotionnelle, vérifiez ce qui se passe. C’est incroyable à quelle fréquence vous trouverez qu’un commentaire que vous avez trouvé blessant n’était pas conçu comme tel. En demandant ce que la personne voulait dire au lieu de l’accuser de ce que vous pensiez qu’elle signifiait, vous donnez non seulement une chance à la personne d’expliquer son comportement et de ramener la situation sur les bons rails, mais vous vous retenez aussi de lui exploser au/le visage.

Cela vaut le temps et l’effort de comprendre l’intention et de découvrir ce qui se passe réellement au lieu de réagir émotionnellement et impulsivement. La raison pour laquelle cette dernière stratégie ne fonctionne pas bien est que pour l’autre personne, c’est vous qui serez soudainement devenu méchant, blessant et/ou violent et qui porterez la faute à ses yeux et ceux des autres : « Il n’a rien dit de blessant, c’est toi qui a pété les plombs et qui l’a agressé ! ». Mieux vaut exprimer une plainte (discussion) que lancer des critiques (agression). Vous conviendrez que vous aurez plus de chance d’avoir un échange constructif en disant « Pourquoi as-tu fais/dit ça ? Est-ce que tu te rends compte des conséquences ? » plutôt que « Sale connard, va te faire foutre ! ». Le rôle d’un démineur est de désamorcer les bombes, pas de les faire exploser.

Evidemment, dans la rue, il en est autrement. Demander à un agresseur qui vous prend à partie pour son amusement pourquoi il vous fait du mal risque au mieux de lui donner un fou rire, au pire de lui donne envie de vous taper encore plus fort. Néanmoins, apprendre à communiquer efficacement quel que soit le contexte a un effet majeur sur la réduction du risque de vous trouver piégé dans une situation de violence.

A défaut de vous amener une solution miracle qui n’existe pas, j’espère que ces quelques lignes vous permettront de lancer une réflexion sur votre façon de gérer les situations à risque.

Quelles sont les situations de violence physique ou psychologique que vous observez ou vivez au quotidien ? Comment les gérez-vous ? Venez discuter dans les commentaires !

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